« Trop de normes tue la norme », entend-on souvent, mais ce mantra politique ne semble pas freiner l’inflation administrative. À l’heure du tout numérique, les démarches sont censées être plus rapides… pourtant, jamais les Français ne se sont sentis autant perdus dans le labyrinthe des formulaires en ligne.
Des promesses recyclées par tous les gouvernements
Depuis Jacques Chirac jusqu’à Emmanuel Macron, la simplification administrative est une promesse récurrente, brandie comme un totem électoral. La droite l’associe à l’efficacité économique, la gauche à une administration plus accessible, mais aucune majorité n’a réussi à faire bouger durablement les lignes. Missions interministérielles, Haut Conseil de la simplification, dématérialisation des services : les dispositifs se succèdent, les rapports s’accumulent, mais la complexité reste, souvent aggravée par de nouvelles normes. Ce n’est pas la volonté politique qui manque dans les discours, mais plutôt la capacité à remettre en cause un système ancré dans ses propres rigidités
Des exemples qui défient le bon sens
Deux cas illustrent la dérive kafkaïenne du système : la demande d’APA (Allocation personnalisée d’autonomie), qui nécessite jusqu’à 35 pièces justificatives, y compris parfois des documents déjà détenus par l’administration ; ou encore la création d’une micro-entreprise, censée être « simplifiée », mais dont les auto-entrepreneurs découvrent les pièges après coup : doublons d’immatriculation, absence de coordination entre URSSAF, impôts et INSEE, relances automatiques sans logique humaine. Ces situations ne sont pas marginales : elles traduisent une logique administrative où la procédure prévaut sur l’objectif de service.
Des citoyens et des entreprises à bout de nerfs
Loin de soulager les usagers, la digitalisation des démarches a souvent ajouté une couche d’incompréhension. Interfaces mal conçues, absence d’interlocuteurs humains, réponses générées automatiquement : les services publics en ligne deviennent une épreuve pour les moins aguerris. PME, artisans, retraités ou jeunes parents se retrouvent seuls face à des plateformes pensées par des ingénieurs déconnectés du quotidien. Et que dire de nos aîné(e)s qui se retrouvent seul(e)s face à ce marasme numérique. Résultat : il s’installe une défiance croissante envers l’administration, perçue non plus comme un partenaire mais comme un mur. Et une certitude pour beaucoup : la simplification administrative, malgré tous les engagements, reste un mirage.